Le maintien du rabais sur le prix du permis de conduire fait polémique alors que les entreprises de transport collectif de la grande région de Montréal envisagent, selon divers scénarios, réduire leurs services en raison de déficits importants.
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Pour 2024, un conducteur au Québec n’aura à débourser que 25,50 $ pour son permis, soit 101,55 $ de moins que le prix normal pour les titulaires d’un permis de classe 5. C’est ce qu’a annoncé mardi la ministre des Transports et de la Mobilité durable, Geneviève Guilbeault.
Comment expliquer une telle remise ?
Les coffres de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) débordent, notamment en raison de la baisse du nombre d’accidents – et donc d’indemnisation – puisque la pandémie de la COVID-19 a entraîné une baisse des déplacements.
En fixant le prix du permis de conduire à 25,50 $, la SAAQ perd 600 millions de dollars de revenus en raison de ce gel des paiements, affirme le gouvernement.
Si de nombreux conducteurs saluent cette annonce, d’autres y voient une occasion manquée d’utiliser ces fonds pour financer les transports publics.
« Annonce importante du ministre de l’Automobile du Québec », a ironisé l’ancienne élue locale Justine McIntyre dans un message publié sur X (anciennement Twitter).
«600 millions de dollars de surplus… plus d’un demi-milliard.» Et après, nous n’aurons plus l’argent pour investir dans les transports publics», déplore Angèle Pineau-Lemieux, porte-parole de l’organisme Accès pratique transports.
“Nous continuons à échouer dans les projets de transports publics parce qu’ils sont trop chers, alors qu’en même temps nous nous réjouissons de l’expansion et de l’élargissement des autoroutes et de l’argent qui va directement aux conducteurs.” Et puis nous nous demandons pourquoi les routes sont encombrées. .. », a déclaré le climatologue Chris McCray.
La culture du « Chariot » est-elle à blâmer ?
Selon Florence Junca-Adenot, professeure au Département d’études urbaines et touristiques de l’UQAM, la culture automobile a tout à voir avec la multiplication des annonces d’investissements dans des projets routiers et la réticence perçue à mettre en œuvre des projets de transport collectif.
«C’est parce qu’on vit dans un monde plein de chars», dit en riant celle qui est aussi cofondatrice de l’Alliance pour le financement du transport collectif au Québec.
« La vision (du gouvernement sur les transports publics) est bonne. Nous soumettons les projets à de nombreuses consultations, mais lorsqu’il s’agit de leur mise en œuvre, il ne reste plus d’argent. En revanche, nous continuons à construire des routes. Mais si nous voulons être cohérents en matière de protection de l’environnement, nous n’avons d’autre choix que de développer d’autres outils que la conduite seule et de réaménager nos villes. Et cela peut se faire via les transports en commun”, regrette-t-elle dans une interview. 24 heures pour discuter des transports en commun.
- Écoutez l’entrevue de la ministre Geneviève Guibault à l’émission de Mario Dumont sur Radio QUB :
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Toutefois, l’expert souligne que cela ne signifie pas qu’il ne faut pas construire de routes. Alors que l’étalement urbain continue de s’accentuer, les déplacements en voiture sont souvent inévitables, admet-elle.
Le fait que le Québec, contrairement à l’Ontario, investisse de plus en plus dans les routes que dans les projets de transport collectif peut donc s’expliquer au moins en partie par le manque de densité des villes, affirme Fanny Tremblay-Racicot, professeure agrégée à l’École nationale d’administration publique. .
Dans son budget 2023, le gouvernement de l’Ontario alloue 70,5 milliards de dollars sur 10 ans aux transports publics, tandis que le cadre pour les projets d’agrandissement et de réparation des routes à travers la province prévoit 27,9 milliards de dollars sur la même période.
Au Québec, la classe politique semble oublier le phénomène de demande induite lorsqu’elle décide d’investir dans des projets d’agrandissement routier, explique Mme Tremblay-Racicot en entrevue avec 24 heures via les transports en commun.
« Lorsqu’il y a des embouteillages, (les gouvernements) ont tendance à augmenter la capacité routière. Mais plus nous augmentons l’offre, plus la demande augmente. «Cela s’applique à tous les ministères des transports qui se concentrent sur les routes», souligne-t-elle.
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